Idéalement implanté entre la baie de Chingoudy et l'océan, l'hôtel Eskualduna s'inscrit dans l'ambitieuse politique d'aménagement d'Hendaye-Plage, conduite d'une main de maître par Henry Martinet.
Directeur de la Foncière d'Hendaye, le paysagiste-urbaniste, qui avait parfaitement compris les enjeux du site, proposa, à partir de 1907, un nouveau plan de lotissement sur plusieurs centaines d'hectares.
Accompagnant son projet d'infrastructures de transport, d'établissements de bains et de complexes hôteliers, le dotant d'une promenade de 5km, d'un plan régulateur d'urbanisme, lui associant une réglementation inspirée des cités-jardins qu'il avait vu en Angleterre, le créateur d'Hendaye-Plage parvint à faire passer la station balnéaire dans une ère nouvelle, en scellant son avenir.
CELUI QUI EST BASQUE
Lui-même constructeur d'une cinquantaine d'hôtels en France, Martinet projeta, comme clou de ses établissements de luxe, la construction d'un palace hôtel qui, face au casino, devait séduire une clientèle fortunée.
Par son imposant développement et la notoriété de sa clientèle, l'hôtel structurait la vie de la station balnéaire.
Martinet n'hésita pas à choisir le style néo-basque pour un programme de cette importance. L'hôtel proposait 300 chambres, se déployant sur 7 niveaux et une vingtaine de travées, avec une galerie marchande en rez-de-chaussée.
Cette affirmation régionaliste se traduit d'ailleurs jusque dans le nom de l'hôtel : Eskualduna signifie « celui qui est Basque ». La construction, qui s'échelonne de 1906 à 1912, prenant pour modèle la référence labourdine sur une très grande échelle est une première, qui sera bientôt suivie par d'autres architectes.
Pour cela, Martinet utilise la technique du copié-collé, décomposant, fragmentant et assemblant des éléments disparates de différentes volumétries.
Ainsi, le palace-hôtel évite la monotonie par une multitude de séquences, de rythmes et de scansions. De même, la diversité de décrochements des toitures, l'alternance des galeries avec des loggias ou des balcons en encorbellement animent le grand ruban des façades.
Le tout est cependant unifié par quelques poncifs néo-basques : de faux colombages en béton ou l'alternance du rouge des boiseries sur le blanc des murs.
Martinet, qui conjugue habilement modernité et pittoresque, majesté et fantaisie, réitérera l'expérience régionaliste à grande échelle pour l'immeuble Jordan à Bayonne, en 1930.
Si les intérieurs de l'Eskualduna conservent aujourd'hui encore quelques rares vestiges de son âge d'or, le cloisonnement des volumes, lorsqu'il fut aménagé en appartements, en a malheureusement fait disparaître son élégance originelle. Dominique Dussol
hendaye (2020). Dans 101 sites et monuments qui racontent le pays basque .