Borgès, le voisin de Buenos-Aires, a dit que les hommes descendent du singe et les Argentins du bateau.
Il aurait pu préciser que beaucoup de ceux qui ne viennent pas d'Italie ou d'Extremadura sont descendus de Soule ou de Navarre avant d'embarquer vers le Nouveau Monde.
N'y a-t-il pas d'ailleurs là chose somme toute normale quand on sait que beaucoup des conquistadores qui firent la gloire de l'Espagne du Siècle d'or (le XVIe) portent haut des patronymes on ne peut plus transparents ?
Christophe Colomb était entouré de Basques, Cortès choisit Juan Ochoa de Elejalde, originaire de Leintz-Gatzaga (Guipúzcoa), comme premier gouverneur du Mexique.
Juan Sebastiân Elkano (connu en France comme El Cano), qui fut le premier à boucler le tour du monde à la voile (Magellan mourut aux Philippines), naquit à Getaria en Guipúzcoa.
La ville l'honore tous les quatre ans en commémorant son atterrissage. Le Victoria, son navire, seul à revenir, était par ailleurs une caraque construite dans les chantiers navals voisins de Zarautz. Et comment ne pas citer Aguirre (plus exactement Lope de Aguirre), popularisé au cinéma par Werner Herzog (Aguirre, la colère de Dieu, 1972) qui fit sécession et tutoya Philippe II d'Espagne, le souverain le plus puissant de la Terre.
Il était né, fils cadet sans aucun droit au patrimoine familial, à Oñate, en Guipúzcoa.
Il illustre à sa façon ce qui a alimenté l'exode des Basques jusqu'à former une véritable diaspora.
En terre basque, pour éviter la fragmentation du domaine, l'aîné emportait tout et les cadets étaient poussés à l'aventure. Ce qui valait chez les nobles au XVIe siècle alimenta l'émigration de paysans pyrénéens (il y eut aussi beaucoup de Béarnais) sans terres au XIXe et même au XXe siècle.
Si vous avez la curiosité de visiter Ellis Island, l'île devant New York où débarquèrent tant d'Européens affamés mais pleins d'espoir, vous constaterez l'énorme proportion des Basques dans les Français venus faire fortune dans cette nouvelle terre promise. Consultez le site internet créé dans ce but et vous saurez de quel bateau et à quelle date votre lointain cousin a posé le pied là-bas.
Les Basques d'Amérique ont bien réussi.
On trouve leurs noms si caractéristiques partout dans le Nouveau Monde. Il suffit de prendre un annuaire téléphonique de Dallas ou de Bogotá. C'est ce que faisaient, il n'y a pas 50 ans, des amis de mon père, désargentés mais avides de connaître le vaste monde, quand le soir ils cherchaient une chambre amie où dormir sans bourse délier.
Ils n'ont jamais passé une nuit à la belle étoile. Plus généralement, combien de présidents sud-américains, de ministres, de footballeurs, d'artistes nommés Duhaide, Echevarria ou Arotzarena ? Dans l'État américain du Nevada, prés de Reno, une statue de l'artiste Nestor Basterretxea appelée Bakardade (« Solitude ») rend hommage au berger basque venu si loin de chez lui garder le troupeau de son patron.
L'Arizona, État de l'Ouest sauvage, tiendrait peut-être son nom du basque aritz ona, « bon chêne ».
les basques d'amérique (2018). Dans pays basque une terre, l’océan et des hommes .